Décryptage
Impôt sur la fortune immobilière : que faut-il déclarer ?


Le rapport de la Cour des comptes1, publié le 25 janvier 2024, dont ces chiffres sont issus, souligne que « les règles d’assujettissement à l’IFI restent toutefois peu aisées à comprendre par les contribuables et peuvent générer des incertitudes juridiques ».
Les règles ne sont effectivement pas simples à comprendre et les biens pas toujours faciles à évaluer. Pour autant, il incombe au particulier de remplir sa déclaration d’IFI et l’administration fiscale s’est dotée de nouveaux moyens de contrôle et de nouvelles sanctions (cf. « Actualités fiscales » ).
Si le patrimoine immobilier de votre foyer fiscal dépasse une valeur nette taxable de 1 300 000 €, vous êtes, en principe, imposable à l’IFI.
Hormis les cas où le législateur a fixé des bases d’évaluation, les biens doivent être déclarés par le contribuable pour leur valeur vénale au 1er janvier de chaque année. Par ailleurs, seules certaines dettes sont déductibles pour la détermination de votre IFI.
Plusieurs problématiques se posent donc :
- Quels sont les biens imposables ?
- Quels sont les biens exonérés ?
- Quelles sont les dettes déductibles ?
- Etc.
Les principaux biens imposables à l’IFI
Biens et droits immobiliers détenus en direct
Les immeubles bâtis ou non bâtis que vous détenez en direct, au même titre que les droits réels immobiliers dont vous êtes titulaire (ex : usufruit, droit d’usage ou d’habitation), entrent dans le champ d’application de l’IFI. Les biens taxables sont évalués d’après leur vénale au 1er janvier de l’année d’imposition. Des règles d’évaluation spécifiques sont prévues dans certains cas de figure. Par exemple, votre résidence principale bénéficie d’un abattement de 30 %, sauf si vous la détenez au travers d’une société civile immobilière. Par ailleurs, l’évaluation d’un immeuble loué doit tenir compte des conditions de location.
L’administration fiscale, consciente de cette difficulté, a mis en place, depuis plusieurs années, le service en ligne Patrim pour permettre au contribuable d’estimer la valeur de ses biens.
Titres de sociétés
Les titres de société que vous détenez sont, en principe, imposables à hauteur de la fraction de leur valeur représentative de biens ou droits immobiliers. Il existe cependant plusieurs atténuations à ce principe.
Par exemple, si vous êtes associé d’une société ayant une activité commerciale (type boulangerie) qui détient pour seul bien immobilier ses propres locaux ou si vous détenez une participation minoritaire (moins de 10 %) dans une société ayant une activité exclusivement commerciale, vos participations dans ces sociétés ne seront pas prises en compte dans la détermination de votre IFI.
Attention, les règles de prises en compte des dettes de société dans la détermination de la base imposable à l’IFI ont été modifiées par la loi de Finances pour 2024 pour mettre fin aux montages consistant à diminuer la valeur des titres par la création de passif sans rapport avec l’immobilier imposable (cf. « En un clin d’œil » ).
Contrats d’assurance vie et de capitalisation
Les contrats d’assurance vie rachetables ou de capitalisation sont imposables à l’IFI à hauteur de la fraction de leur valeur de rachat au 1er janvier représentative des actifs immobiliers imposables comprise dans certaines unités de compte (exemple : parts de SCPI ou d’OPCI).
Si vous détenez un contrat d’assurance vie et que vous avez investi sur un support immobilier, il conviendra de vous rapprocher de votre assureur pour qu’il vous communique la fraction imposable.
Plan d'épargne retraite (PER)
Le PER peut prendre la forme d’un compte-titres (PER bancaire) ou d’un contrat d’assurance vie (PER assurantiel). Pour vérifier cet élément, il faut regarder s’il y a ou non une clause bénéficiaire.
Il est possible de détenir via un PER des fonds (parts ou actions de sociétés ou unités de compte) selon qu’il s’agit d’un PER bancaire ou d’un PER assurantiel, éligibles à l’assiette de l’IFI.
Si le PER prend la forme d’un compte-titres, il est toujours soumis à l'IFI dès lors que le compte-titres contient une part d'actifs entrant dans les assiettes de cet impôt, le caractère rachetable ou non étant inopérant2.
Si le PER prend la forme d’un contrat d’assurance vie, complexité supplémentaire puisqu’il faudra déterminer au préalable s’il est ou non considéré comme rachetable. Ce n’est que dans ce dernier cas qu’il sera imposable à l’IFI (dans les mêmes conditions que l’assurance vie).
Zoom sur les biens démembrés
En principe, les biens démembrés sont pris en compte pour leur valeur en
pleine propriété dans le patrimoine de l'usufruitier imposable à l’IFI
sans qu’aucun abattement au titre du démembrement ne soit possible. Le
nu-propriétaire, quant à lui, n’a rien à déclarer à l'IFI.
Il existe néanmoins plusieurs exceptions à ce principe. Notamment, lorsque
le démembrement résulte
de l’usufruit légal du conjoint survivant, l’usufruitier et le nu-propriétaire sont imposés séparément selon la
valeur de leur droit respectif déterminée en fonction de l’âge de
l’usufruitier (barème forfaitaire prévu à l’article 669 du CGI). En
revanche, si le conjoint survivant détient l’usufruit d’un bien imposable
à l’IFI du fait d’une donation au dernier vivant, seul l’usufruitier est
imposé pour la valeur du bien en pleine propriété.
Attention :
Lorsque le conjoint survivant occupe la résidence principale au titre de son droit temporaire au logement, il échappe à l’IFI (ce droit n’étant ni cessible ni transmissible). Les héritiers propriétaires du bien devront prendre en compte ce bien pour la détermination de leur IFI mais pourront bénéficier de l’abattement de 30 % prévu pour la résidence principale.

Les principaux biens exonérés d’IFI
Certains biens peuvent être exonérés d’IFI de manière totale ou partielle.
Les biens affectés à l’exercice de l’activité professionnelle
Les biens affectés à l’exercice de votre activité professionnelle (activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale), qu’ils soient détenus en direct ou par l’intermédiaire d’une SCI, peuvent être intégralement exonérés d’IFI. Attention, les conditions d’application de cette exonération diffèrent selon les modalités de détention de l’immobilier et d’exercice de votre activité professionnelle. Par ailleurs, si vous détenez des biens à usage mixte (d’habitation et professionnel), vous devez déclarer la partie utilisée à titre privée.
Un changement dans l’exercice de votre activité professionnelle (notamment l’exercice de fonctions de direction), la cession de votre entreprise ou encore votre départ à la retraite peuvent rendre imposable à l’IFI un bien immobilier jusqu’alors exonéré. Si la conservation des locaux professionnels vous permet de percevoir des revenus complémentaires, attention à bien mesurer l’impact au regard de l’IFI : si la conservation du bien vous rend redevable de l’IFI, il faudra que vous pensiez à le déclarer.
Les bois et forêts et parts de groupements forestiers
Lorsque les biens professionnels ne sont pas qualifiés et à certaines conditions, notamment l’engagement d’appliquer une des garanties de gestion durable pendant 30 ans, ces biens peuvent bénéficier d’une exonération partielle d’IFI à hauteur de 75 % de leur valeur.
Ce type de biens peut être recherché pour continuer à investir dans l’immobilier tout en limitant la base taxable à l’IFI.
Les biens ruraux donnés à bail à long terme ou à bail cessible et les parts de groupements fonciers agricoles
Lorsqu’ils ne sont pas considérés comme des biens professionnels, ces biens peuvent, à certaines conditions, bénéficier d’une exonération partielle de 75 % de leur valeur jusqu’à 101 897 €, puis de 50 % au-delà.

Les grands principes de déductibilité des dettes
L’IFI s’applique sur le montant du patrimoine net taxable, c’est-à-dire
après déduction des dettes.
En principe, les dettes afférentes à un actif imposable, existantes au 1er
janvier et supportées effectivement par le redevable de l’IFI, sont déductibles.
Remarque :
La déduction est, en principe, proportionnellement limitée à la fraction de valeur imposable de l’actif concerné. Par exemple, si les bois et forêts détenus bénéficient d’une exonération de 75 % de leur valeur, l’emprunt3 d’acquisition de ces biens ne pourra être déduit qu’à hauteur de 25 % de son montant. Par exception à ce principe, la dette afférente à la résidence principale est déduite en intégralité (malgré l’abattement de 30 %) mais dans la limite de la valeur imposable de la résidence principale. Ainsi, pour une résidence principale de 300 000 € et une dette afférente de 100 000 €, la résidence sera retenue pour une valeur de 210 000 € et la dette intégralement déductible. Au contraire, pour une résidence principale de 300 000 € et une dette afférente de 250 000 €, la dette ne sera déduite qu’à hauteur de 210 000 €.
Seules certaines dettes, énumérées limitativement par la loi, sont déductibles de l’IFI. Il s’agit :
- des dépenses d’acquisition, de réparation, d’entretien, d’amélioration, de construction (ou reconstruction) et d’agrandissement des biens ou droits immobiliers ;
- des dépenses d’acquisition des parts ou actions au prorata de la valeur des biens ou droits immobiliers imposables ;
- des impositions dues à raison de la propriété à l’exclusion de celles incombant à l’occupant et celles dues à raison des revenus générés par le patrimoine immobilier. Par exemple, la taxe foncière est déductible mais pas la taxe d’habitation.
Attention, certaines dettes peuvent pour autant ne pas être déductibles en
raison de la qualité du prêteur. Ainsi, pour illustration, les prêts
contractés par le redevable auprès de son conjoint, directement ou par
l’intermédiaire d’une société, ne sont pas déductibles. De même, les prêts
souscrits, directement ou indirectement, par le redevable (ou un membre de
son foyer fiscal) auprès d’un ascendant, descendant ou frère et sœur d’un
membre du foyer fiscal ne sont pas déductibles sauf à justifier du
caractère normal des conditions de prêt.
Lorsque le patrimoine taxable est supérieur à 5 millions d'euros et que le
montant des dettes excède 60 % de cette valeur, la fraction des
dettes excédant cette limite n'est déductible qu'à hauteur de 50 %
de cet excédent.
Les règles d’assujettissement à l’IFI sont complexes. N’hésitez pas à contacter votre Conseiller en Gestion de Patrimoine. Il pourra vous guider pour déclarer correctement cet impôt.
1 Rapport de la Cour des comptes « Observations définitives – L’Impôt sur la Fortune Immobilière (Exercices 2018-2022) » publié le 25 janvier 2024
2 Cf. Réponse ministérielle Malhuret publiée au JO Sénat le 9 février 2023
3 Plus précisément, le capital restant dû au 1er janvier, les intérêts échus et non payés au 1er janvier et les intérêts courus au 1er janvier sont déductibles.